Le monde est un spectacle, la vie un passage : tu es venu, tu as vu, puis tu t’en es allé. (proverbe grec)

Depuis le soliloque de Macbeth, à la scène 5 du dernier acte de la tragédie homonyme de Shakespeare, l’image de l’homme ne faisant qu’une brève apparition dans le théâtre de la vie a pris des dimensions tragiques. Citons ce passage dans la traduction qu’en a donnée François-Victor Hugo : « La vie n’est qu’un fantôme errant, un pauvre comédien – qui se pavane et s’agite durant son heure sur la scène – et qu’ensuite on n’entend plus ; c’est une histoire dite par un idiot, pleine de fracas et de furie, et qui ne signifie rien. »

Life’s but a walking shadow, a poor player
That struts and frets his hour upon the stage
And then is heard no more. It is a tale
Told by an idiot, full of sound and fury
Signifying nothing.

Selon certains, le philosophe atomiste Démocrite serait l’auteur de notre sentence, qu’on lit dans un recueil tardif de proverbes grecs (Apostolios XII 58). Or la vie humaine comparée à un jeu théâtral est un lieu commun, aussi bien chez les Grecs de l’Antiquité que dans les langues néo-latines.

S’appropriant la seconde partie de cette pensée dans son célèbre veni vidi vici – dont l’allitération et l’asyndète suggèrent en l’occurrence la rapidité de sa victoire et non la brièveté de la vie humaine – Jules César en a durablement assuré la célébrité ; or la traduction française je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu n’en donne qu’un pâle reflet. Et la rendre par je vins, je vis, je vainquis ne vaut guère mieux, la répétition du pronom personnel je cassant l’élan de la phrase. Preuve en est le fait que, depuis toujours, on cite en latin – en les prononçant véni, vidi, vissi –  ces trois verbes au prétérit. Quant à forcer la langue en les traduisant par “vins, vis, vainquis”, il ne saurait en être question, le français ne pouvant, sans se dénaturer, faire ici l’économie du pronom personnel sujet !

Mais au fait, le passé simple de l’indicatif est-il toujours vivant ?… 

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