La chance aide parfois, le travail toujours. (proverbe brahman)

On lit dans The Robert Collier Letter Book (1931), célèbre manuel d’autoréalisation, la maxime suivante : « Le succès est la somme de petits efforts, répétés jour après jour », ce qui va dans le sens de l’ancienne sagesse hindoue et qui en précise la portée. En effet, l’enseignement de ce proverbe, auquel s’ajoute encouragement, sinon mot d’ordre, est qu’il ne faut pas compter sur la chance, mais sur ce qui est en notre pouvoir, à savoir notre effort, lequel doit être constant. Et que celui-ci, finalement, reçoit toujours son salaire ! Pour le moine pieux du Moyen Age, la Règle élaborée par saint Benoît de Nursie à l’intention de ses frères, appelés depuis lors bénédictins[1], est Ora et labora : « Prie et trime ! » Ayant à l’origine le sens de peiner, le verbe latin laborare a pris dans les langues romanes, par l’intermédiaire d’une expression de bas latin telle que celle-ci, le sens que nous donnons aujourd’hui au verbe français travailler. Et saint Bernard de Clairvaux (1091-1153) de commenter, dans une lettre à sa sœur : Qui orat et laborat, cor levat ad Deum cum manibus : « Qui prie et travaille, c’est comme s’il élevait son cœur à Dieu avec ses propres mains. » En italien, on cite souvent une maxime attribuée – sans raisons suffisantes – à Charles Darwin : Il lavoro nobilita luomo : « Le travail annoblit [moralement] l’homme[2] ». Aussi ne suffit-il pas, pensons-nous, de répéter sur un ton plus ou moins comminatoire, avec Phocylide de Milet (VIe  siècle av. J.-C.) par exemple : « Tu dois payer ta vie par ton travail », ou avec saint Paul (2 Thess. 3, 10) : « Celui qui ne veut pas travailler ne doit pas non plus manger »[3]. En effet, le travail préserve l’homme de nombreux maux qui le guettent, aussi bien physiques que psychiques, dont la dépression nerveuse. Ainsi, comme le veut Esope repris par La Fontaine : « Le travail est pour l’homme un trésor » (Fables V, 9) ; ou encore cette sentence enregistrée par William Blake, Proverbs of Hell, 1793 : « L’abeille laborieuse n’a pas le temps d’être triste ». [1] Dans l’histoire du monachisme occidental, l’ordre bénédictin est, historiquement parlant, le plus ancien ordre monastique de l’Eglise latine. Le fondateur en est saint Benoît de Nursie, en Ombrie (vers 480-547), lequel, aux environs de l’an 529, fonda l’abbaye du Mont-Cassin, où il rédigea vers 540 une Règle. Reprise par saint Benoît d’Aniane (v. 750-v. 821) – du nom de l’abbaye qu’il fonda dans l’actuel département français de l’Hérault – elle se répandit largement à l’époque carolingienne dans l’Europe médiévale. « Saint Patron de l’Europe, messager de paix,  fondateur de la vie monastique en Occident… lui et ses fils, avec la Croix, le livre et la charrue, apporteront le progrès chrétien aux populations s’étendant de la Méditerranée à la Scandinavie, de l’Irlande aux plaines de Pologne. » (Paul VI, 1964) [2] Au sens latin de homo, de Mensch en allemand, comme nous l’avons déjà précisé et comme il se doit en français… [3] Faisant écho à ce verset de la Genèse (3, 19) : « A la sueur de ton visage tu mangeras du pain jusqu’à ce que tu retournes au sol, car c’est de lui que tu as été pris. » V. aussi les versets 17ss. — D’administrateur du Paradis qu’il était à l’origine, Adam, pour avoir mangé du fruit de l’arbre de la connaissance [du bonheur et du malheur], dont Dieu lui avait formellement interdit de manger, fut condamné à travailler pour s’assurer sa subsistance et celle de sa famille.